Les blancs troupeaux aux colliers de rubis
Se déplacent lentement dans l'infini
Taches rouges écarlates
Les jours de grand vent
De mille feux éclatent
Dans l'immensité du firmament .
-----------------------------------------------------------------
Par une nuit d'automne
Douce et monotone
Impétueuse , fougueuse
Trop curieuse , je crois !
La tendre Emeth
Jeune et blanche licorne
Telle une chevrette
Fit un pas de trop en avant
Se pencha sur le néant
Entraînée par le poids
De sa belle corne
Tomba brutalement
Au pays des vivants
Sans doute sur les souhaits
Les appels discrets
Et trop pressants
D'un poète ou d'un enfant .
Sur la terre des hommes
On eut d'intérêt et d'yeux
Que pour cet animal fabuleux
On caressa Emeth , on la calma
La loua , on s'émerveilla
L'encensa , la fêta
Pareille à une déesse
De sa queue , on fit des tresses
De sa crinières , mille caresses
Puis on la jaugea , l'estima
Un peu , beaucoup , trop !
Vaniteuse , elle parada
Fièrement , elle passa
Sous le nez des curieux
La sotte , au galop
La naïve , au trot
On la flatta , tata son cou
Son collier de rubis lui ota
On regarda sa corne
D'un gentil coup de sabot
Elle éloigna les badauds
L'un plus rusé , plus perfide
A la face grise et morne
Lui tendit un fruit juteux
Rond , vert , savoureux
Qui n'existe que sur Terre
Au pays des hommes
Une délicieuse pomme .
Emeth n'avait qu'un seul péché
La gourmandise
Il faut bien l'avouer !
Mais quelle sottise !
Ne se méfiant plus , la stupide
Dégusta le fruit bien mûr
En choeur , les hommes
Se ruèrent sur elle
La capturèrent , la ligotèrent
La ficelèrent contre un mur
Lui coupérent les ailes .
Dans notre monde borné
Un cheval ne peut être ailé !
Quelle manque d'imagination
Notre triste civilisation !
Emeth dans un doux murmure
Geignit : " Non , par pitié
Je ne pourrai plus voler
Au pays de mes soeurs
Ne pourrai plus aller ! "
La faute à pas de chance
Sa corne à elle seule
Représentait l'abondance
La toute-puissance
Pour ces êtres sans coeur
Valait son pesant d'or
Plus que mil trésors ;
On la tailla , la scia
Sans se soucier de ses cris
De sa peur
De sa souffrance
De sa terreur .
Avec mépris
De ses crins
On fit des cordeaux
De sa peau
Des sacs à main
D'Emeth il ne resta rien
Juste un rêve de chagrin
Mais de ce doux équin
On se souvient....
----------------------------------------
De nos jours
Aujourd'hui
Seuls nos amis
Les animaux
Et les âmes au coeur pur
Ont la chance
D'apercevoir
Les licornes blanches
Quand le ciel est azur
Quand le silence est murmure
Dans l'infini elles défilent
Elles caracolent
Comme des folles
Font des cabrioles
Loin des villes
Loin des tours
Loin des hameaux ;
Ou de rencontrer
Ces brillantes cavales
Secrètes cabales
De la Voie Lactée
Au détour d'un chemin
Quand s'enfuit le jour
A l'orée d'un bois
Quand tombe le soir
Voile sombre et noir
Sur l'univers satin
Par grand froid
Ou bien au printemps
Par beau temps
Faire des galipettes
Ou encore en été
Quand l'air est pur
Les soeurs d'Emeth
Cachées derrière le mur
D'un château
Aux abords d'un ruisseau
Tendre berceau
D'une lointaine
Fontaine
Sereines
S'abreuver .
--------------------------------------
Sur leur invite
Elles rendent visite
Aux doux rêveurs
Aux êtres de coeur
Mais toutes ont peur.
Se souviennent de leur soeur
La douce Emeth
Insouciante jeunette
Gourmande licornette
De la valeur de l'argent
Et surtout de l'or
Chez les Terriens
Ces habiles mentors
Ces gens de rien ;
Et aussi du délicieux
Fruit défendu
Qui l'a perdue
Au subtil goût de pomme
Acidulé , juteux
Le piège des hommes
Ces êtres crapuleux
Cruels et veules .
---------------------------------------------
Voilà pourquoi
Elles ne viennent
Plus jamais seules
Mais accompagnées
De leur doux ami
Pégase , le fidèle
Qui les suit à la trace
De place en place
De ses ailes déployées
Cache tous les pommiers
Fait table rase
Des arbres fruitiers
Leur laissant brouter
Les pissenlits
Les airelles
Les graminées
Les églantiers
Et les rosiers
Déposant sous leurs pieds
Des pétales de roses
A peine écloses
A l'arôme inédit
Afin d'effacer l'odeur
Des vergers
Et la saveur
Du fruit interdit .
------------------------------------
Souvent le soir
Devant mes yeux
Tres , très tard
S'étend comme une ombre
Immense et sombre
Entrecoupée
D'éclats rouges
En grand nombre
Qui parfois bougent
Un étendard
Dans les cieux
Triste et noir
Pégase , berger
De ses larges ailes
Surveille son troupeau
De peur qu'il s'égare
Et tombe en enfer
Sur notre terre
Dans ce tombeau
Ce monde sans pitié .
/fdata%2F3004719%2Favatar-blog-1102409587-tmpphpUEkIbl.gif){kind=avatar}